Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme" disait Antoine Lavoisier sur la conservation des masses, lors de la transformation de la matière. Cette notion peut bien s'appliquer à moi d'une manière spirituelle. Je ne cesse de me redécouvrir, d'absorber, d'assimiler et de recréer une nouvelle identité dans mon pays d'accueil sans toutefois perdre mon identité originale. L'amalgame de nouvelles valeurs combinées à celles apprises dans le Maroc de ma naissance forment un nouveau résultat hybride qui en vaut l'effort et me surprend toujours. Ce voyage au cœur de l'expérimentation a une grande influence sur mon travail d'artiste. J'essaie constamment "de persuader" la porcelaine d'accepter d'autres matériaux. Je la pousse à assimiler la terre, les végétaux, les métaux, le verre et les minéraux jusqu'à ce que les limites du genre soient dépassées et constituent une opportunité pour les espèces nouvellement métamorphosées de persister et de survivre. Dans ce processus, où j'accueille favorablement l'amalgame de matériaux qui crée l'œuvre, le nouvel hybride déclenche souvent une expression plus forte que les identités précédentes. Ces moments de découvertes, délicieux et exaltants, redéfinissent constamment les bases de mes critères esthétiques. Le produit des luttes et de la fusion des matières ressemble souvent à un cadeau. Mon approche intuitive est liée à une attitude que j'ai développée dans la vie et qui prend exemple de la façon dont la transformation se produit simplement dans les formes naturelles vivantes. L'utilisation d'un processus répétitif qui donne inexorablement un résultat naturel, quel qu'il soit, apaise mes peurs alors que je fais face aux défis d'assimilation et de rapprochement de deux cultures. Je cherche à transposer, dans un objet matériel, la complexité et la fragilité de la vie et de l'identité propre à chacun.